des keurs de toutes les couleurs
L’anarchie relationnelle pourrait être bien plus que la liberté de baiser
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traduction d’une note de blog de lae bloggeur·euse queeranarchism

“Il faut que je te dise quelque chose” me dit le gars que je venais de ramener dans ma minuscule chambre d’hôtel, comme nous nous couchons dans le lit. “Je suis un anarchiste relationnel”. Ca a peu d’importance à mes yeux. On venait de se rencontrer dans un bar (un bar anarchiste, donc ce n’est pas une grande surprise pour moi). Je suis en vacances et je repars dans trois jours. Pourquoi devrais-je en avoir quelque chose à faire de de la manière dont il gère ses relations ? mais il a l’air de penser que cela nécessité une clarification. “Ça veut dire que je couche avec plusieurs personnes et que je n’étiquette pas ces contacts comme des relations. Je vois les gens quand j’en ai envie”. A nouveau, ça m’importe peu.

Mais ses mots persistent. C’est ça, l’anarchie relationnelle? Le polyamour combiné à l’absence d’engagement ? J’espère vraiment que non. Ce type de liberté individuelle, la liberté de ne pas former de relations durables, la liberté de toujours suivre ses propres désirs, baiser à gauche à droite sans engagement, ça m’a plutôt l’air de capitalisme relationnel. cependant ce mec n’était pas le premier ‘anarchiste relationnel’ que je rencontrais à définir l’anarchie relationnel par “je fais ce que je veux”.

J’imagine que l’anarchie relationnelle m’attire rarement parce que celleux qui la pratiquent semblent trop obsédé·es par la nonmonogamie.

Pour moi, l’anarchisme concerne l’engagement. La construction de communautés. Des communautés qui rejettent les ‘règles’ du capitalisme, de la propriété, du travail, des membres productifs et improductifs, de la compétition. Des communautés qui, plutôt, choisissent le soin1, la coopération, l’égalité, la reconnaissance que nos différences forment nos forces, et de chacun·e selon ses moyens, à chacun·e selon ses besoins. Et dans cette communautés, nous créons les règles qui nous conviennent, et y mettons fin quand elles ne correspondent plus à notre communauté.

Ainsi, pour moi, anarchie relationnelle signifie communauté. Une communauté de deux ou plusieurs. Une communauté qui rejette les « règles » des relations, l’hétérosexualité forcée, la monogamie forcée, le sexe obligatoire entre partenaires, le mariage, l’éducation des enfants à deux et l’idée que nous aurions besoin d’une relation romantique ou sexuelle pour être entiers. Une communauté qui au contraire choisit l’attention, la coopération, l’égalité, la reconnaissance que notre valeur ne se limite pas à nos relations et que nous avons tous des besoins différents. Et dans cette communauté, nous faisons les règles qui nous conviennent, et en changeons quand elles ne conviennent plus à notre communauté.

Par cette définition, une relation anarchiste est d’abord et avant tout une histoire de coopération et de poser nos propres règles. Par cette définition, elle n’est jamais égoïste mais toujours mutuellement bénéfique. Par cette définition, elle peut être une relation monogame si c’est ce qui rend heureuxes les personnes impliquées. Par cette définition, elle pourra tourner autour de l’amitié, de la romance, du sexe, d’une sélection de ces choses, mais par définition elle tournera autour du care. Et intuitivement, je dirais qu’une relation anarchiste est un système de soutien mutuel contre le monde capitaliste brutal, oppressif qui nous entoure. Le monde est un endroit oppressif et pourri qui cherche à nous diviser mais nous avons choisi de nous soutenir les un·es les autres, de créer un endroit sécurisant dans les chambres que nous partageons quand nous les partageons, de nous aider les un·es les autres dans les jours et les années difficiles, de nous rappeler les un·es les autres que nous traversons cela ensemble.

Cette version de l’anarchisme relationnel automatiquement-polyamoureuse-sans-engagement ‘je fais ce que je veux’ n’y ressemble pas.

1 “care”, j’utiliserai ce mot non traduit, ndt

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